OTILLÖ Sensations Inside
Christophe n’avait pas envie de nous faire un nième compte rendu de cette course qui commence à être connue l’OTILLÖ, championnats du monde, mais de partager avec nous ses sensations d’avant et d’après course. Il avait aussi envie de revenir sur cet intense moment de partages entre les français de l’OtillÖ race 2021.
Texte : Christophe Charpentier
Photos : Jean-Marie Gueye, Pierre Mangez
Dans l’avion qui me ramène à la maison et alors que j’écris ces quelques lignes en repensant à ce weekend prolongé dans l’archipel de Stockholm un seul mot me vient à l’esprit : Vivant !
Vivant c’est bien ce que l’on ressent avant, pendant et après cette légende du swimrun.
On se sent vivant d’avoir vécu et partagé une incroyable palette d’émotions.
Cette fois je ne ferai pas un compte rendu de course interminable où moi-même je m’y perdrai tant le parcours est riche. Oui les cailloux sont glissants et très techniques, oui l’eau est froide, oui les îles sont belles et sauvages, oui le semi est difficile, oui c’est long...
La légende du swimrun c’est vraiment quelque chose qui se vit de l’intérieur avec son binôme, et tous les mots, adjectifs, et autant de lignes ne suffiraient pas à décrire cette formidable épopée.
Non cette fois, je voudrais plutôt parler de l’avant et de l’après, des émotions et de la formidable aventure humaine qui commence à l’arrivée à Stockholm les jours précédents, l’occasion pour chacun de faire un petit peu de tourisme, de comprendre et d’observer ce mode de vie scandinave si accueillant et si différent du nôtre.
On déambule à la découverte de la ville, on goute la nourriture locale, on retrouve d’autres français, ils sont nombreux, on cherche un spot de baignade, de course à pied, ou les deux. On se retrouve au hasard du chemin à partager une natation avec Nicolas et la team Envol on profite de son hospitalité sur sa terrasse pour nous réchauffer avec du thé. Petit à petit on glisse vers l’immersion, au sens figuré comme au sens propre, les discussions tournent toutes autour des températures, du temps, du choix de la combinaison et on écoute avec attention les conseils des vieux routards du circuit.
Cette année l’eau sera froide et cela accentue l’appréhension générale. Nous sommes samedi soir, l’avant-veille de la course. La team des Frenchies s’est donnée rdv à un dîner-buffet convivial pour la distribution des sweats spécialement logotés pour l’occasion (merci Hugo et Benjamin). Même si pour certains nous ne nous connaissons que via les réseaux sociaux, groupes FaceBook ou Messenger, les liens se tissent rapidement autour d’une passion et d’un objectif commun. Pas d’excès ce soir-là, on sait tous que la nuit de l’avant-veille est primordiale.
Dimanche matin, certains ont encore nagé ou couru dans la matinée, surtout pour se rassurer, à 14 h tous les swimrunners sont pris en charge par les bus de l’équipe Ötillö, la tension monte d’un cran lorsqu’on se retrouve tous en vase clos dans un superbe complexe hôtelier à Djurönäs et et qu’on récupère notre pack course et les goodies qui vont avec. Chacun y va de son ressenti pour gérer l’objectif à venir : baignade dans la Baltique pour certains, dans l’eau chaude de la piscine, sauna ou farniente pour d’autres.
Des groupes se forment par affinités ou par bassin géographique, nous ce sera Les Sudistes avec Annabelle, Cathy, Christian, les 2 Seb, et les Lapins blancs de Marseille :Fred et Seb. C’est aussi l’heure des derniers réglages, du check matériel, le froid est au centre de toutes les discussions...
En fin d’après-midi c’est la photo de groupe des Frenchies 2021 qui est immortalisée par Jean Marie de Swimrun France, 37 équipes c’est pas rien ! Cocorico qu’est-ce qu’on est beaux et fiers avec nos sweats tricolores ! Une belle cohésion de groupe, y’a pas à dire les couleurs ça rapproche !
Après le shooting, le briefing, que dire ? Là aussi ça se vit, salle comble, 15e édition, un teaser qui prend aux tripes, Michael et Matt touchants par leur proximité, leur humanité, et un public déjà conquis. Niveau charge émotionnelle on n’est pas trop mal !S’en suit le dîner d’avant course où on sent bien que chacun est dèjà un petit peu dans sa bulle, l’équation température/météo/équipement est dans toutes les têtes... 1 bonnet, 2 bonnets, manches courtes, manches longues, manchons de mollets ou pas, cagoules et gants pour certains, top lycra ou néoprène, et même empilement de combinaisons pour d’autres, et on recommence 1 bonnet, 2bonnets, ....
On rentre dans nos chambres tôt, on prépare le matériel, la nutrition, on re- vérifie tout. On appréhende tous cet objectif d’une ou de plusieurs saisons, d’une vie pour certains. La nuit sera courte voire inexistante, pour ma part je me suis répété 100 fois le film de la 1ere natation, longe ou pas longe, le froid intense qui s’immisce jusqu’à l’hypothermie, jusqu’à l’abandon... reste une seule question qui me taraude top néoprène ou lycra ? J’abandonne je réglerai ça demain. La tension est à son paroxysme, je trouve finalement le sommeil en me disciplinant mais il sera de courte durée, 3h tout au plus...
2 h 30 du matin, je suis réveillé. J’attends sagement que le réveil sonne à 3h15 pour aller déjeuner, à ce moment-là on ne maîtrise plus le temps qui s’égrène inexorablement jusqu’au coup de clairon du départ. On déjeune vite, on évite les longs échanges, on file dans nos chambres récupérer nos bagages et, moment magique, 4h30 du matin on trace à travers la nuit sur un petit sentier éclairé à la bougie vers le quai où le ferry nous amène vers la starting-line sur l’ile de Sandhamn. On est tous dans le même bateau qui vogue vers notre but ultime prendre le départ de la finale l’Ötillö 2021.
C’est à ce moment que je me décide à changer mon top néoprène contre mon top lycra, choix que je n’ai pas regretté par ailleurs. Le bateau est une sorte deparenthèse joyeuse où tout le monde se tartine de vaseline, à la sortie il nous faut abandonner nos bagages qui nous attendront à Utö, point final denotre périple que nous espérons tous atteindre au terme d’une longue et dure journée... un instant j’envisage de rester caché dans les bagages, mais non ce n’est pas raisonnable... !
La course est la course mais celle-là est vraiment exceptionnelle, elle sera plus ou moins longue, plus ou moins douloureuse, on pleurera, on s’embrassera sur la finish- line, on jurera qu’on n’y reviendra pas ou au contraire qu’on y reviendra plus fort ! Pour ma seconde participation qui sera peut-être la dernière je voulais profiter un maximum de chaque instant et même si j’ai lapé ma montre à chaque transition je n’ai jamais regardé le temps total jusqu’à me retrouversous l’arche d’arrivée, et c’est bien comme ça, car finalement qu’est-ce que le temps sur une épreuve comme celle-ci ?
Cette finish-line a un goût particulier, un goût suédois : les athlètes qui ont terminé en début d’après-midi sont au contact des arrivants jusqu’à la nuit tombée, c’est exaltant. On mange on boit des bières, les champions sont mêlés aux pratiquants de tous niveaux, ici il n’y a plus ni masque ni barrière, juste de la convivialité et de la camaraderie.
Et puis on finit de nouveau tous ensemble autour d’un incroyable diner-buffet et de la remise des prix qui a vu cette année pour la 1ere fois depuis son histoire des Français monter sur la 3e marche du podium malgré une blessure. Bravo à Hugo et Mathieu, c’est de bon présage pour la suite.
La course est finie et nous sommes toujours sous la houlette de cette belle organisation pour une dernière nuit tous ensemble dans les petits chalets typiques de Utö, partagés avec d’autres équipes, on a hâte de s’allonger, la nuit est douloureuse mais le sentiment du devoir accompli est omniprésent.
Mardi 6h30 dernier petit déjeuner gargantuesque, encore, les corps meurtris, boitants, mais notre esprit est ailleurs plein d’images. 8h30 c’est l’heure du départ. Michael et Matt nous saluent depuis le quai de Utö sous les applaudissements général. Rahhhh encore un beau moment d’émotions et de partage.
Dans le ferry qui nous ramène à Stockholm, l’atmosphère est pétillante, la joie de l’objectif réalisé et de la fantastique aventure est sur tous les visages malgré les courbatures et les blessures pour certains, chacun y va de sa petit anecdote et de ses futurs objectifs, l’ambiance est à la bienveillance et au partage.
Le retour se fait au travers d’une multitudes de petites îles qui nous font revivre notre folle épopée d’hier, on se quitte difficilement sur les quais de Stockholm, on se promet de se revoir bientôt, la parenthèse se referme, ainsi va la vie de la légende du Swimrun.
Merci à Annabelle, ma binôme du jour, pour l’accompagnement de dernière minute sur la course et ta performance sachant que tu n’étais pas vraiment préparée... heureusement pour moi !
Alors reviendra ou reviendra pas ? Hier je savais, aujourd’hui je ne sais plus... Je pars mais un infime morceau de moi est resté là-bas sur ces îles.
This is Ötillö World Championship