Bordeaux Paris

Bordeaux - Paris est un pan de l’histoire du cyclisme. Cette épreuve n’est rien d’autre que la plus ancienne course d’endurance du monde, qui a vu le jour en 1891. Elle a été ressuscitée récemment par les organisateurs d’Extra Sports, qui l’ont remise au goût du jour. L’un de ses concurrents 2022 ? Grégoire, nous la fait vivre de l’intérieur...

Bordeaux Paris, c’est une ligne TGV reliant deux des plus grandes villes de France en moins de trois heures, un lien fort entre la capitale et une ville en plein développement. Alors, oui, on aurait pu parler du progrès des transports, des canelés, de la beauté de la capitale de la Gironde. Mais on n’est pas là pour ça ! Parlons plutôt sport. Le sport compte des légendes, des symboles. Et qui n’a jamais rêvé de rentrer dans la légende ?

En cyclisme, les légendes peuvent être incarnées par des coureurs devenus icônes. Les légendes peuvent aussi être des cols (le Stelvio, l’Izoard, etc), des routes (le carrefour de l’arbre, ça vous parle ?) mais aussi des courses. Parmi celles-ci, on compte les historiques (les grands tours), les incontournables classiques (Milan- San Remo, Paris Roubaix, La Ronde, etc) mais aussi les originales (la Strade Bianche, même pas 10 ans et déjà parmi les grands !).

Etant natif du Nord, je suis naturellement inspiré par les pavés de Paris- Roubaix et les courses flandriennes, si populaires, si belles, si dures. Pour autant, d’autres courses m’ont toujours intéressé, des courses qui n’ont jamais été ou qui ne sont plus professionnelles. Par exemple, Paris - Brest - Paris est un incontournable (et pas qu’un dessert). Au même titre, Bordeaux - Paris est pour moi un pan de l’histoire du cyclisme. Cette dernière n’est rien d’autre que la plus ancienne course d’endurance du monde, eh oui, rien que ça. Elle a vu le jour en 1891, on imagine alors les machines et la difficulté de l’épreuve. Depuis, il est vrai que des courses bien plus longues ou plus dures ont vu le jour à l’image d’une transcontinentale, de la RAF (Race Across France) , de la RAM mais l’histoire... ça se respecte !

Parmi les souvenirs les plus marquants concernant Bordeaux Paris, on compte la victoire d’Anquetil le lendemain de son succès final lors du Dauphiné Libéré en 1965. Au-delà du sport, on se souvient de cette édition puisque le vainqueur,
qui a rallié les deux courses en avion, en dormant une petite poignée d’heures, avouera plus tard: «Vous pensiez sincèrement qu’il est possible de courir Bordeaux-Paris sur la lancée du Dauphiné avec de simples morceaux de sucre ?».

Cette course a littéralement glissé dans l’oubli, disparu des radars depuis quelques années. Mais le cyclisme est comme la mode, c’est un éternel recommencement. Grâce aux efforts et à l’investissement de l’agence Extra Sports, voici que ce monument est de retour au calendrier. Etant gourmand de kilomètres et surtout toujours à la rechercher d’un objectif pour ne pas vider mon frigo quotidiennement, j’ai décidé de m’inscrire sur cette épreuve.

LE FORMAT DE LA COURSE

Bordeaux - Paris, ça n’est pas très compliqué. Vous prenez votre carte de France, vous tirez un trait presque droit entre les deux villes et vous passez donc par de minuscules bourgades dans des régions où vous ne mettriez pas une roue en temps normal (sauf en étant local de l’étape). Cela vous donne une balade de 650 kilomètres (hors détour boulangerie). Côté dénivelé, quelques 5000 mètres de dénivelé. Pour autant, les grimpeurs n’y sont pas les rois, en effet le parcours se compose surtout de toboggans incessants entre les kilomètres 150 et 350. J’y avais d’ailleurs laissé des plumes sur la reconnaissance de la course en 2021.

La course est individuelle et (censée être) sans ravitaillement extérieur. Sur le deuxième point, certains ont pris de sacrées libertés, mais chacun sa vie, ou plutôt chacun sa vision. L’organisation propose, elle, trois ravitaillements tout au long du parcours. Le départ se fait par vague de six coureurs. Six c’est en fait le maximum autorisé pour former un «peloton», au-delà de quoi, on n’est plus dans les clous. Même si encore une fois, certains ont leur propre interprétation du règlement (le fameux «oui mais on peut s’arranger»).

La chance que j’ai, c’est qu’au départ mon groupe partage un super état d’esprit et l’envie de faire une «belle» course c’est à dire avec des relais et des bons moments. Parmi les 5 camarades de route, le gros moteur n’est autre que Xavier Fanovard, un triathlète habitué d’Hawaï qui ne fait pas que caresser les pédales. Lorsque la bête me laissera remonter à ses côtés, je découvrirai un gars avec un sacré sens de l’humour et surtout une belle prise de recul sur la situation. Tout au long de la course, je vais croiser pas mal d’autres triathlètes. Je pense sincèrement que cette course, calée fin mai, est parfaite pour venir consolider son foncier avant un Embrunman ou d’autres épreuves estivales. On retrouve aussi énormément de profils différents sur la route : des cyclo purs et durs, de vrais performeurs sur longues distances, d’anciens coursiers, etc.

LA PRÉPARATION

Pour ma part, la préparation est quelque chose de très spéciale. J’en ai fait un doux mélange entre des séances bien piquantes, quelques relevés de watts et de glycémie et une touche finale inspirée du fameux «oublie que tu n’as aucune chance, vas-y, fonce ! On ne sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher». Dame nature ne m’ayant pas sculpté pour un sport comme le cyclisme, je fais avec ce que j’ai. Je suis arrivé au départ de la course avec 4000 kilomètres dans les jambes le 21 mai. Cela peut paraître assez peu (ça l’est) mais lorsqu’on habite en Savoie, il faut aller les chercher vu les hivers que l’on a.

J’ai énormément roulé en vélotaf, ou commuting (comme disent les Américains et les gens du marketing) à grands coups de 140 kilomètres quotidiens par des températures proches de zéro. De ce fait, je n’ai fait que très peu de sorties vraiment longues avec seulement deux ou trois sorties de plus de 250 kilomètres. En gros rien de très rassurant. Mais il faut savoir faire avec ce que l’on a. Le secret est que je n’avais d’autre objectif que de finir la course.

Détail important, je me suis appuyé sur du matériel adapté. J’ai repris le BMC Road Machine que j’avais utilisé sur les 7 majeurs. Ce vélo est devenu un incontournable pour moi tant il me garantit du confort quelle que soit la distance que je veux faire sans rogner sur la performance.

Je me suis aussi tourné vers des technologies qui m’ont rassuré. Depuis longtemps je voulais tester le «Supersapiens», ce capteur d’indice glycémique qui vous accompagne partout et surtout dans vos séances de sport. Et bien vous savez quoi ? J’en suis plus que ravi. Passé le style que vous confère ce patch sur le bras, j’ai enfin trouvé la manière de savoir quand m’alimenter correctement les coups de mou aussi bien musculaire qu’en fatigue pure. J’ai aussi changé mon alimentation. Très longtemps réfractaire aux gels, j’ai découvert la gamme Maurten pour me rendre compte que c’était le maillon manquant pour m’assurer une course dans des conditions optimales. En alliant gels et sachets de poudres iso de la marque, je n’ai jamais eu faim, jamais eu de crampes ni envie de dormir.

PLONGER DANS LE GRAND BAIN

Nous voilà donc à Bordeaux ce vendredi 20 mai. La chaleur est bien présente, nous sommes la veille de la course et je transpire déjà au moment de retirer le dossard. Je ne traîne pas trop sur place et récupère mon dossard rapidement. Sur ce point il faut féliciter l’organisation car le retrait des dossards et les vérifications se sont faits très rapidement et dans une belle ambiance. La pression monte gentiment. Je reconnais une quinzaine de très grosses machines en endurance et comprends que ça va batailler «sévère» le lendemain. On me dit dans l’oreillette que certains visent clairement la barre des 20 heures comme objectif quand, de mon côté, je vise les 26 heures sans compter les ravitos. Le temps de s’installer à l’hôtel, de découvrir l’absence de climatisation dans une chambre à 35°, je refais un dernier tour de mon matériel avant d’essayer de dormir (échec total). Mon conseil pré- course : cochez la case climatisation dans la recherche de logement à Bordeaux, vous n’enchainerez peut-être pas deux nuits blanches d’affilées !

Samedi matin, réveil, le soleil se lève à peine que j’ai déjà le nez dans le petit déjeuner. Le départ se fait à partir de sept heure donc on ne traîne pas. Dès la sortie de l’hôtel, je constate que la chaleur est déjà bien présente, cela n’augure rien de bon ! En route vers la ligne de départ. A ma grande surprise, tout le monde est sacrément détendu. Comparé à un départ de course IronMan ou de trail, les sourires sont très présents. Il faut dire qu’avant d’avoir le nez dans le guidon aussi longtemps, autant en profiter un peu ! On avance donc tous gentiment vers la ligne, départ par vagues de six dans le calme. Le fameux coup de pétard se fait entendre toutes les minutes. A notre tour (rappel, on part à 6), nous voilà enfin sur la route de Paris !

JUSQU’ICI TOUT VA BIEN...

Sortir de Bordeaux ne laisse pas d’immenses souvenirs, hors la traversée matinale de la Garonne. C’est roulant, très roulant. On dépasse déjà du monde, ce qui est logique puisque les départs se font dans l’ordre opposé des objectifs horaires des concurrents. Nous voilà rapidement en Dordogne, après deux heures de course les villages traversés s’animent. On doit d’ailleurs passer parfois entre les étals de marchés, entre les légumes et la viande, croyez-moi je me fais violence pour ne pas embarquer un poulet ! L’air est bon, jusqu’à midi nous allons bénéficier d’une température chaude mais pas handicapante.

Au kilomètres 130, les premiers toboggans apparaissent. Un toboggan, qu’est-ce que c’est ? A la croisée entre une montée de cols et un pont d’autoroute de moins de 100 mètres, le toboggan est une petite bosse pour puncheur. Très souvent, le toboggan s’emploie au pluriel avec un enchainement très casse patte de bosses vous obligeant à être tout le temps en prise sans avoir le temps de récupérer dans de très rapides petites descentes.

Reprenons... kilomètres 130, les premiers toboggans arrivent mais c’est surtout le premier ravitaillement qui pointe le bout de son nez. Nous sommes encore à six avec mon groupe de départ mais déjà un de mes partenaires nous fait signe qu’il ne pourra pas nous suivre toute la journée. Peu surprenant car malgré la décontraction apparente, on roule allègrement à plus de 30 kilomètres par heure. Jusqu’ici tout va bien... je suis à l’aise et je crois qu’on a tous besoin d’appuyer un peu pour faire redescendre la pression.

Ainsi arrive le premier ravitaillement, nous sommes au kilomètre 150 en Charente. La décision est prise de laisser notre camarade pour repartir à cinq. Mais voilà... le chat noir n’étant autre que moi, au moment de repartir je me rends compte qu’une de mes petites sacoches de cadre explose littéralement. Le temps de réparer ça (j’ai toujours deux trois sangles velcro à dispo) et je dois sacrément m’employer pour récupérer le groupe.

ET ÇA SE COMPLIQUE...

La chaleur qui nous frappe depuis le matin devient accablante pour mon gabarit. L’enchaînement de toboggans me marque, je ne veux et ne peux pas prendre le risque de me «cramer». Dans l’ascension d’une énième bosse, je me laisse décrocher par le groupe pour garder un rythme plus calme et prendre mon mal en patience. Le ravitaillement extérieur n’est pas autorisé mais rien n’interdit de s’arrêter dans les boulangeries ou supérettes.

Je fais donc le plein au détour d’un village, me pose quelques minutes à l’ombre d’une église pour faire le point : pourquoi suis-je ici aujourd’hui ? Le temps de me rappeler que je dois trouver du plaisir, je remonte en selle.

Petit conseil, si niveau style le camelbak n’est pas au top, sur une distance aussi longue, c’est quand même un sacré confort lorsque les températures sont chaudes. J’ai toujours eu à boire là où beaucoup ont pu «sécher» et je pense que ça y est pour beaucoup dans le bon déroulement de ma course. Mon rythme est ridicule mais les kilomètres passent. Je sais que lorsque j’aurai atteint le deuxième ravitaillement à Châteauroux, j’aurai passé cette longue portion dont le profil n’est pas adapté pour moi. Mais l’endurance c’est avant tout de la patience. Quitte à jouer avec mes nerfs, le sort veut que je crève alors que je suis à l’arrêt. La chaleur est telle que le matériel en devient plus fragile. Cette crevaison est simplement due au contact d’une roue sur ma valve qui fait littéralement exploser ma chambre. Mais à chaque malheur, son lot de consolation. En effet, sûrement témoins de mon désarroi, des concurrents viennent vérifier que tout va bien pour moi et m’aident à remonter le vélo. On discute, je roule seul depuis un petit moment, le courant passe bien et vite entre nous. Après 10 heures de selle, je suis séparé de Xavier la machine et de mon groupe depuis deux voire trois heures, le temps me semble long et cette nouvelle rencontre est une opportunité de basculer dans un cycle nouveau.

Désormais au sein d’un nouveau groupe de six coureurs, c’est un nouveau départ qui m’est offert. Les kilomètres défilent, je récupère à la fois des sensations et mes jambes. Dans ce groupe, je rencontre Monsieur Emmanuel Faro, alias Manu, un ancien (la soixantaine est passée) coursier de très haut niveau. Pour l’histoire, il a coiffé au poteau un certain Greg Lemond il y a quelques années, rien que ça ! Il découvre la longue distance mais a beaucoup plus de kilomètres que moi au compteur cette année. Surtout, on discute cyclisme, sport. Je décroche complètement le nez du compteur à ses côtés et on avance à nouveau à un bon rythme !

CHÂTEAUROUX, LA MI-COURSE

Enfin nous voilà à ce second ravitaillement. C’est ici même que s’était terminée pour moi la reconnaissance un an auparavant. Intérieurement, je suis donc rassuré sur mes chances de boucler cette course en «non-stop» (sans arrêt pour dormir). On s’accorde ici une grosse demi-heure pour manger et se changer. La journée et la température ont marqué les esprits et le matériel, autant repartir sec et propre puisque l’on retrouve ici des sacs de délestage. Les calories avalées, nous passons aussi en mode nuit en rallumant nos éclairages. Il est presque 22 heures, il nous reste 300 km à rouler, autant le faire en sécurité. Nous repartons sans nous rendre compte que la chaleur laisse désormais place à une douce fraicheur.

Le temps de sortir de la ville, le rythme est très bon. On se laisse dépasser par quelques solitaires plus pressés que nous mais l’on en reprend aussi quelques-uns. A six, nous nous sentons vraiment «plus forts» ou en tout cas plus «sûrs». Le problème est que nombreux sont les prétendants à «la greffe». A chaque fois que quelqu’un nous suce la roue trop longtemps, on fait un rapide arrêt pipi (parfois même «air pipi») histoire de l’inviter à continuer sa route en solo...Pourquoi ça ?

Tout d’abord car le règlement l’impose et je ne me vois pas jouer avec les règles alors que j’organise moi-même des épreuves sportives (devoir d’exemplarité) mais aussi car de nuit, il me paraît encore plus dangereux de rouler avec un groupe élargi. Chaque courbe, chaque rond-point est une occasion de frotter et possiblement de chuter. Aussi, on se rend compte que les greffes sont très souvent là pour prendre la roue mais rarement pour la donner, on préfère donc la jouer «réglo» et suivre le règlement à la lettre.

Châteauroux est désormais derrière nous, nous remontons désormais vers la Loire et ses châteaux. Le temps d’apercevoir les monuments illuminés, on remet la tête dans le guidon. Notre progression est réellement bonne car, dans le noir, on se concentre sur notre effort. Il nous faut être régulier, éviter toute accélération qui pourrait s’avérer fatale dans quelques heures.

MER, LE DERNIER RAVITAILLEMENT.

Le rythme est tellement bon que l’on ne l’a pas vu arriver. Nous sommes au milieu de la nuit, un dernier arrêt s’offre à nous. Nous sommes en Indre et Loire, autrement dit, dans l’inconnu pour moi. Je sais qu’il nous reste plus de 200 kilomètres et qu’ils seront les plus durs. Mentalement, je m’accorde le fait d’avoir couvert «la moitié» du parcours en termes de difficulté.

Pourquoi ? Car jusqu’au premier ravitaillement, tout se fait sur «l’excitation» sans avoir l’impression d’être en course. Ensuite les toboggans composent un énorme morceau (donc un tiers de la difficulté dans mon découpage du parcours). La nuit sera le second tiers, un tiers roulant mais pouvant être le théâtre d’accrochage ou d’accident, l’attention doit y être constante ce qui accroit la fatigue. Le dernier tiers se fera au lever du jour. La fatigue sera réelle, présente, et il faudra faire avec pour trois ou quatre heures de selle sans partir à la faute.

Ce dernier ravitaillement marque la moitié de la nuit, la moitié de ma course. La difficulté pour moi est, qu’à la différence des parcours alpins où j’aime évoluer de nuit, le plat «m’endort». Je fais donc le plein de produits caféinés et les réserves de nourriture solide. Mon pack Maurten est largement suffisant pour avancer mais le petit morceau de pain-fromage n’est rien d’autre qu’un petit plaisir (contre productif physiquement mais mentalement bénéfique). Nous ne nous attardons pas à Mer. Il est temps de reprendre la route.

Une fois de plus, des greffes tentent leur chance. Les esprits, de par la fatigue, ont tendance à perdre en patience et à s’échauffer. J’essaie de calmer le jeu en expliquant à tous qu’on est là pour le plaisir. Pour autant, certains ne veulent pas le comprendre et s’obstinent à nous prendre la roue, sans jamais prendre de relais. Un autre arrêt se fera donc à peine trente minutes après le ravitaillement pour se retrouver à six. La nuit passe très vite, nos corps profitent de la fraîcheur jusqu’à l’aube.

L’AUBE, LE RÉVEIL QUI PIQUE

Avez-vous déjà tenté de vous réveiller à l’aube après une longue nuit de fête ? En tant qu’ancien rugbyman, c’est une expérience que je connais plutôt bien. L’aube et les premières lueurs ont eu sur moi un effet de sortie de boîte de nuit.

Comme si l’ivresse nocturne redescendait pour laisser place à une mauvaise gueule de bois. Je n’avais clairement pas vu arriver cet énorme coup de fatigue, il est net, rapide et surtout accablant. Et le problème est que nous sommes tous touchés par le même symptôme. Nous sommes désormais dans le Loiret, un petit vent face / trois quart face accompagne le soleil qui se lève. Nous entamons là deux heures interminables. Paris est désormais indiqué sur les panneaux des routes nationales, mais nous paraît loin très loin. Personnellement, j’ai une motivation, un but me permettant d’avancer : atteindre la Chevreuse. Pourquoi ? Car je sais qu’elle est vallonnée et que j’y prendrai du plaisir.

De ce fait, j’essaie de prendre un maximum de relais. Nous raccourcissons le temps de nos relais pour essayer de garder une dynamique. Un arrêt se fait au kilomètre 550. Nous faisons le point sur notre état de forme. Il est vrai que ce n’est pas beau à voir, mais l’envie d’en finir prédomine. Encore 80 kilomètres pour atteindre les Yvelines, Châteaufort et la boulangerie qui nous offrira un dernier arrêt.

Nouvelle entorse à mon régime sportif, j’avale un petit pain au chocolat avant d’entamer les kilomètres que j’ai préférés sur cette trace. Châteaufort est le synonyme de belles côtes (habitant en Savoie je ne pourrais pas parler d’ascension) qui nous donnent l’occasion d’appuyer un peu.

Je retrouve ici la joie d’être sur la selle, les 15 prochains kilomètres forestiers et vallonnés vont me donner l’énergie pour en finir. Je prends même (inconsciemment) le risque de me cramer en faisant la course dans «la montagne de Paris» avec quelques cyclistes locaux, mais l’important est ailleurs : les panneaux annoncent Versailles dans quelques kilomètres. Restant groupés, nous faisons la pause photo devant les grilles du château sous le regard un peu interrogateur de touristes étrangers. Il faut les comprendre : imaginez un groupe de six cyclistes avec des têtes de lendemain de soirée, le sourire (et la bave) aux lèvres qui prennent la pause, se congratulent et crampent en se relevant !

Les dix derniers kilomètres sont anecdotiques (mais pas plats), mentalement difficiles de se fondre dans la circulation pour rejoindre Issy-les- Moulineaux mais nous restons prudents. Une fois de plus, l’organisation nous a gâtés avec une arrivée dans une enceinte flambant neuve. Un tour de piste (ça n’est pas la Cipale mais quand même) et nous passons la ligne d’arrivée, toujours groupés.

CE QUE JE RETIENDRAI DE CETTE EXPÉRIENCE

La course en solitaire... J’avais envisagé de faire ce parcours en solo, en véritable solo Mais le départ groupé m’a fait changer de mode. Le fait d’entamer le parcours en discutant, en échangeant m’a empêché de me re-projeter dans une course solitaire. J’ai eu besoin, en étant dans le creux de la vague, de me retrouver seul pour prendre un rythme mais ce qui m’a tenu, ce sont les rencontres. Je n’oublierai jamais Xavier, Ellie, Manu et ceux qui ont fait de cette course l’expérience qu’elle est.

Le parcours et la préparation adéquate. 650 kilomètres et quelques 5000 mètres de dénivelé, c’est relativement lisse mais soyez-en sûr, ça n’y parait pas quand on est sur le vélo. Je n’ai pas pu me préparer réellement pour ce parcours. Je vous conseille d’enchaîner au moins 500 kilomètres dans un week-end en plus de vos sorties habituelles, je pense que cela m’aurait bien aidé dans les dernières heures.

LE MATÉRIEL

En long, priorité au confort ! Je pense que les prolongateurs auraient peut-être pu m’aider si j’avais suivi mon objectif de rouler seul. En groupe, avec la fatigue, je ne les aurais pas utilisés. Le règlement les autorise, à vous de voir ! Pour le vélo, j’ai mon désormais RoadMachine 01 et son montage en Sram Etape AXS qui me garantissent une plage optimale quelles que soient les conditions de route. Ce vélo passe partout, reste confortable sur des routes défoncées. Que demander de mieux ?

NIVEAU PORTAGE

J’ai aussi rapidement parlé du Camelbak : avec des modèles ultra lights de trail, présentant des faibles litrages, vous avez là une solution pour ne jamais manquer d’eau sans pour autant être gêné par la présence d’un «poids» trop important. Pour le reste j’ai fait confiance à Zéfal pour des sacoches de cadre vraiment adaptées à moi d’être plus lucide et plus fin avec les fermetures éclairs !

CÔTÉ PRATIQUE

Une organisation réellement au top. Si l’équipe d’organisation ne peut pas faire la police sur les routes en permanence, vous pouvez lui faire confiance sur la logistique et les ravitaillements. Pour vous enlever toute pression supplémentaire, gardez à l’esprit que le départ de la course se fait dans un quartier très proche de la gare de Bordeaux Saint Jean. Trouvez-vous un hôtel confortable, pour le reste, le transport de vos sacs de délestage est parfaitement géré. A l’arrivée, idem. Toutes les affaires étaient prêtes bien avant que nous ne descendions des vélos. Le site est à portée de main des transports en commun pour rallier toutes les gares parisiennes. On se croirait limite en vacances !

Plus d'infos : 

https://www.bordeaux-paris.com

Par : Grégoire Hétuin

Photos : Florent Geninatti, Arthur Bertrand, Baptiste Tesle, Wagon
Blanc

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *